De Vaasa à Kemi

Vaasa_1.JPGHier j'ai continué mon ascension vers le Nord en partant de Vaasa pour aller à Kemi à la pointe extrême du Golfe de Botnie. Cette route ne fait que de longer la côte et je m'attendais à 500 kilomètres de "dramatic scenic routes" comme je l'avais vécu l'année dernière en Norvège à Aalesund et encore mieux à Kristiansund. Il n'en a rien été et la route longe la cote dans les terres. Et comme en Finlande, il n'y a que des forêts ou des petits bois qui encadrent les champs je n'ai rien vu de la mer. Mais comme de Helsinki à Kemi la Finlande est plate comme si elle avait été tracé au cordeau, on ne voit jamais un petit horizon ni une ligne de fuite.Du coup on entre en introversion, peut-être en apnée.

Vaasa_2.JPGIl est impossible de se faire une perspective. De plus, de Helsinki à Vaasa et de Vaasa à Kemi, la route nationale ne traverse que 5 à 6 villes, on est toujours abonné à la forêt et aux terres cultivées qui les entourent et les entrecoupent. Sur 1000 kilomètres vous avez les champs de céréales et les champs jaunes de colza ou d'une espèce variétale de ce genre. Vous avez un vert bien lumineux sous ce soleil qui m'accompagne sans arrêt depuis 9 jours. Après Oulu, on sent venir les sapins au tronc dégarni et le sol couvert de lichen blanc. Le reste des forêts a été pour l'instant comme chez nous en Alsace, mais en plus long et avec plus de lacs. L'Office de tourisme est très organisé, il y a toujours des panneaux sur la route qui indiquent les sites à visiter. Mais très souvent, après un crochet de 20 kilomètres vous arrivez devant un grand panneau multilingue peint avec une carte qui dit que vous êtes arrivé à un site mémorable qui remonte au XVIème siècle, mais il n'y a rien à voir d'autre. Et très souvent vous avez des stèles de morts sous les balles russes de la revanche soviétique... car la Finlande avait collaboré activement avec Hitler.



Vaasa_3.JPGEn norvégien, danois, suédois vous avez quelques similitudes avec l'allemand ou l'anglais, et... avec...l'alsacien !!! Vous ne pouvez rien commencer avec le finlandais dans lequel il y a souvent dans le même mot des "ä" répétés, des "k" répétés, des "ü" répétés. Aucun système de sèmes, de morphèmes n'est interprétable pour un non initié. Du coup je ne lis plus les panneaux de direction et je me fie au GPS pour rouler. Même en lisant 10 fois un mot on le prononce encore de travers en s'essuyant les teux.

Mes coordonnées du jour sont 65°40N, 24°31E. A 66° je passe le cercle polaire arctique qui n'est qu'à 5O kilomètres d'ici. Depuis Vaasa j'ai quitté la zone de canicule qui est remontée jusqu'à Murmansk et bien sûr Saint Petersburg et qui avait apporté au moins 30° à l'ombre. Donc pour rouler j'ai remis le foulard de soie pour la gorge, le foulard tissé sur la nuque, un gilet et la veste. L'eau du radiateur qui oscillait ces 8 derniers jours de 70° à 80°, était stabilisée à 60° maximum et retombait souvent vite à 50°. Je n'ai qu'un ventilateur électrique qui s'enclenche à 83°. Je roule à 70 sur cette route dont la vitesse maximale est à 8O pratiquement tout le temps, sinon des petits tronçons sont autorisés à 100.

_DSC0183.JPGLe tarmac a toujours la qualité d'un tapis de billard, mais les finlandais roulent presque toujours 20 km/h en dessous de la vitesse maximale autorisée. Ils peuvent donc rester derrière moi en colonne sur 50 kilomètres sans s'énerver, les camionneurs aussi qui ne vous talonnent jamais à 30 centimètres. Même les Norvégiens n'ont pas cet art de rouler. Donc pour ceux qui veulent aller à Nordkapp, je vous conseille la Finlande. Et rien de mieux pour oublier au volant sa sciatique, les Doliprane 1000 et les Voltarène ne font pas d'effet... Pour compléter je suis entrain d'avoir un torticoli, il vaut mieux que ce soit moi et pas la voiture. Mais Nordkapp n'est qu'une vue de l'esprit, il n'y a de toute façon plus rien à voir sur les derniers 600 kilomètres. La terre est à raz, seuls les français bruyants se distinguent par le rayonnement universel de leur savoir et ne perdent pas une minute pour vous le faire entendre. N'empêche, les finlandais adorent les français, et je donne à mon anglais encore plus la french touch. Souvent, il me disent "Strasbourg... Belgium". Ils adorent l'Europe et ne savent pas quoi faire avec ce double-Parlement européen de Bruxelles et de Strasbourg. Moi non plus. Mais je préfère cette remarque que celle des anglais en dessous de la ligne Londres-Bristol qui me disent "Strasburg... Ouw, Germany".

Kemi_2.JPGKemi est donc à l'extrême pointe du Golfe de Botnie qui est sous les glaces de novembre à juin. Un pittoresque brise-glace, le seul au monde qui offre des croisières de passagers, trace des routes pendant cette période, et les bateaux peuvent donc y arriver.

Kemi est donc la pointe sud de la Laponie, mais je n'ai vu ni moustiques qui ont dû griller en vol sous la canicule. La manager du camping m'a dit avec un tendre accent anglais, "it was teunderrrrring, but now it is a little bit cold". Je suis en short et torse-nu au camping même en sortant de la douche. Mais pour les finlandais cette canicule est la plus forte depuis 75 ans et ils ne disposent pas du vocabulaire pour tout ce qui est au-dessus de 20° à l'extérieur. Même tous les thermomètres publics à affichage lumineux indiquent +20, le reste au-dessus, il faut se l'imaginer.

Kemi_3.JPGIl y a encore un mystère qui me poursuit depuis Helsinki. Dans tous les WC de restaurant, de camping, il y a juste à côté de la cuvette des WC un flexible avec un petit pommeau de douche. Je n'ai pas osé faire un travail pratique avec cet objet que vous ne trouverez pas chez Obi ou Lapeyre. Je sais qu'en Suisse vous avez des cuvettes de WC all inclusive ou vous pouvez choisir le programme de lavage, séchage, léchage, rinçage. Nous sommes peut-être ici en présence d'une itération à la finlandaise de ce similaire suisse.

J'ai l'impression qu'à Kemi il n'y a rien à voir hormis les nombreux hôtels de luxe qui sont les points de chute pour les touristes qui veulent faire en hiver la Laponie. On peut lire partout: "Laponia Safaris - Wild thing!" Hier soir je suis allé sur la jetée, au port, pour manger. Les finlandais, par ici, au port, ce vendredi soir, m'ont semblé avoir bien moins de retenue. Tout le monde m'a abordé de bon cœur comme si j'étais un père-noël intergalactique. Kemi_4.JPGIls ont tout voulu savoir. Ici ils sont bien moins anglophones, mais comme partout en Finlande... il ne faut surtout pas essayer de s'expliquer en allemand. Ils disent d'emblée qu'ils les détestent. C'est général en Finlande. Parmi ces curieux, il y en avait tout de même pas mal qui étaient déjà copieusement bourrés pour commencer ce WE. On voit aussi sur cette très pauvre "croisette", plein de jeunes avec des scooter kités et des moins jeunes qui font du macadam cruising avec des autos démodées mais qui ont plus ou moins 4 jantes larges en alu. Rares sont les autos qui ont une peinture non défraichie, mais ce tourne-en-rond avec scratch au démarrage doit sûrement éveiller les premiers signes de l'oestrus chez les femmes du port qui ont des cheveux jaunes, rouges et qui doivent se sentir séduisantes avec un T-Shirt bien trop court qui dégagent bien les bourrelets. Cette "croisette" n'est pas un lieu de rencontre payant, elle est le lieu normal d'arpentage des habitants de Kemi et il y a bars, restaurants, pizzerias qui servent des pizzas mexicaines ou texanes. Kemi_5.JPGIl n'y a pas le choix d'une pizza italienne, ils ne connaissent pas, mais le "flavour is stronger, you know". Il y a toujours une grande fascination des finlandais, comme des  norvégiens pour l'Amérique. Je croise par jour une 40aine de fifties et de sixties roulantes, restaurées ou en excellent état de conservation. Dans les garages on voit pointer aussi des barnfind, et hier il y avait sur un plateau une énorme Cadillac péniche qui avait pris l'eau de partout. Souvent ces autos ont le pot troué. On voit aussi assez de Volvo Amazon, des PV 544 et sa version Duett avec châssis et en fourgon taulé.

Les drivers de Harley et de Gold Wings me saluent de la main et lèvent le pouce, en souvenir de César. Je suis des leurs, la brioche en moins.

MAIS, la chose la plus frappante depuis Vaasa, est le silence des bords de mer. PAS une mouette. C'est affreux une mer sans la cacophonie des mouettes!

La fonction "commentaire" s'affiche du côté public,
mais ne fait pas aboutir les commentaires sur le back-office, modération ou pas.
Seul l'auteur du site peut déposer ses commentaires à partir du back-office (problème informatique).

copie non commerciale partielle à l'identique autorisée avec citation de source.
Un site est un acte public. Je n'alimente pas de forum.
A propos de l'auteur.

Conforme à la Charte

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Fil des commentaires de ce billet